Sortie du DVD de Notre Monde
Notre Monde Notre Monde (2013, 119') un film de Thomas LacosteRassemblant plus de 35 intervenants, philosophes, sociologues, économistes, magistrats, médecins, universitaires et écrivains, Notre Monde propose un espace dexpression pour travailler, comme nous y enjoint JeanLuc Nancy à « une pensée commune ». Plus encore quun libre espace de parole, Notre Monde sappuie sur un ensemble foisonnant de propositions concrètes pour agir comme un rappel essentiel, individuel et collectif : « faites de la politique » et de préférence autrement.
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© Passant n°40-41 [mai 2002 - septembre 2002]
© Passant n°40-41 [mai 2002 - septembre 2002]
par Bernard Daguerre
Imprimer l'articleFrance Etats-Unis Deux vitalités cinématographiques inégales (et combinées) et comparées
Les personnages de détective privé ne font pas vraiment partie du patrimoine cinématographique français, à la différence des Etats-Unis. Ils nont pas cette dimension de redresseurs de tort à vocation universelle, qui est plus facilement leur apanage là-bas ; ils restent ici marqués par leur fonction de détecteurs de secrets sans noblesse (recherche de preuve dadultère par exemple). Doù le caractère souvent un peu caricatural, de perdants pitoyables que le cinéma français leur accorde volontiers : le personnage dEugène Tarpon dans Polar de Bral daprès Manchette ou celui de « lil » (Michel Serrault) dans Mortelle Randonnée de Miller.
Interprétant un employé dune agence privée de recherche dans le dernier film de Guillaume Nicloux, Une affaire privée, Thierry Lhermitte ne rompt pas avec cette tradition. On peut même dire quil la cultive et la laboure : solitaire, pratiquant assidu de dînettes arrosées de bière en boîte devant sa télévision, divorcé inconsolable, amant dispersé et désabusé, tel est notre enquêteur. Chargé délucider la disparition dune jeune fille, il sacquitte de sa mission sans conviction apparente ; il se fourvoie dans quelques fausses pistes et ségare mais point trop dans un club échangiste. Au final, on a moins un film noir quun film gris ou plutôt dans une jolie demi-teinte de ces couleurs-là.
Wesh-Wesh de Rabah Ameur-Zaîmeche a été tourné à Montfermeil en Seine-Saint-Denis. On y voit Kader, (personnage interprété par le réalisateur), jeune adulte et fils aîné dune famille algérienne, rentrer en France après avoir subi la double peine. Son jeune frère est dans les trafics de shit et en perdra la liberté, sa sur va se marier à un avocat. Lui cherche du travail et nen trouve pas. Ce film est aussi attachant que lavait été Les curs verts dEdouard Luntz (1966) que la Cinémathèque de Toulouse proposait ces jours-ci, un des premiers films sur la population jeune des grands ensembles avec une problématique certes plus morale sur la loi et lordre. Moitié documentaire et moitié fiction, film sans prétention et cri du cur et de rage, Wesh-Wesh parle du sentiment de relégation des habitants de ces grandes cités, tout comme de la délinquance et de laction de la police, dont on mesure ici la « proximité ». Sur un thème identique, mais avec une dimension donnant plus de part au rêve et une superbe évocation des friches industrielles ferroviaires, les cinémas Utopia avaient proposé lannée dernière Georges Washington, film américain de David Gordon Green que je ne
saurais trop recommander.
Le dernier film de Woody Allen, Hollywood Ending, est une comédie sentimentale, enlevée et malicieuse en diable. Les Français devraient avoir un motif supplémentaire de laimer. Non seulement parce que le réalisateur samuse de notre travers supposé daimer les films abscons ; mais aussi par son thème : le retour à la réalisation dun cinéaste réputé difficile est compromis par sa soudaine et inexplicable cécité ; il est sauvé de cette très mauvaise passe par son ancienne femme, qui a, bien que fiancée au producteur, encore quelque sentiment en réserve. Tout en se moquant du personnage de cinéaste quil incarne, il népargne pas le producteur, dont il brocarde lorigine californienne et le sens de léconomie des moyens. Ça ma rappelé Le Mépris, où Jack Palance, le producteur, drague brutalement BB, la femme de Michel Piccoli, le scénariste ; Piccoli racontait que Godard, pendant le tournage du film, envoyait des télégrammes injurieux à Carlo Ponti, le producteur, le traitant de fasciste et pire encore chaque fois que lautre lui rappelait la dimension capitaliste de laffaire. La similitude des deux films sarrête là. Jignore les rapports dAllen avec sa production, mais il a traité son uvre comme une comédie. Godard avait fait de la sienne une tragédie de lamour.
Interprétant un employé dune agence privée de recherche dans le dernier film de Guillaume Nicloux, Une affaire privée, Thierry Lhermitte ne rompt pas avec cette tradition. On peut même dire quil la cultive et la laboure : solitaire, pratiquant assidu de dînettes arrosées de bière en boîte devant sa télévision, divorcé inconsolable, amant dispersé et désabusé, tel est notre enquêteur. Chargé délucider la disparition dune jeune fille, il sacquitte de sa mission sans conviction apparente ; il se fourvoie dans quelques fausses pistes et ségare mais point trop dans un club échangiste. Au final, on a moins un film noir quun film gris ou plutôt dans une jolie demi-teinte de ces couleurs-là.
Wesh-Wesh de Rabah Ameur-Zaîmeche a été tourné à Montfermeil en Seine-Saint-Denis. On y voit Kader, (personnage interprété par le réalisateur), jeune adulte et fils aîné dune famille algérienne, rentrer en France après avoir subi la double peine. Son jeune frère est dans les trafics de shit et en perdra la liberté, sa sur va se marier à un avocat. Lui cherche du travail et nen trouve pas. Ce film est aussi attachant que lavait été Les curs verts dEdouard Luntz (1966) que la Cinémathèque de Toulouse proposait ces jours-ci, un des premiers films sur la population jeune des grands ensembles avec une problématique certes plus morale sur la loi et lordre. Moitié documentaire et moitié fiction, film sans prétention et cri du cur et de rage, Wesh-Wesh parle du sentiment de relégation des habitants de ces grandes cités, tout comme de la délinquance et de laction de la police, dont on mesure ici la « proximité ». Sur un thème identique, mais avec une dimension donnant plus de part au rêve et une superbe évocation des friches industrielles ferroviaires, les cinémas Utopia avaient proposé lannée dernière Georges Washington, film américain de David Gordon Green que je ne
saurais trop recommander.
Le dernier film de Woody Allen, Hollywood Ending, est une comédie sentimentale, enlevée et malicieuse en diable. Les Français devraient avoir un motif supplémentaire de laimer. Non seulement parce que le réalisateur samuse de notre travers supposé daimer les films abscons ; mais aussi par son thème : le retour à la réalisation dun cinéaste réputé difficile est compromis par sa soudaine et inexplicable cécité ; il est sauvé de cette très mauvaise passe par son ancienne femme, qui a, bien que fiancée au producteur, encore quelque sentiment en réserve. Tout en se moquant du personnage de cinéaste quil incarne, il népargne pas le producteur, dont il brocarde lorigine californienne et le sens de léconomie des moyens. Ça ma rappelé Le Mépris, où Jack Palance, le producteur, drague brutalement BB, la femme de Michel Piccoli, le scénariste ; Piccoli racontait que Godard, pendant le tournage du film, envoyait des télégrammes injurieux à Carlo Ponti, le producteur, le traitant de fasciste et pire encore chaque fois que lautre lui rappelait la dimension capitaliste de laffaire. La similitude des deux films sarrête là. Jignore les rapports dAllen avec sa production, mais il a traité son uvre comme une comédie. Godard avait fait de la sienne une tragédie de lamour.