Sortie du DVD de Notre Monde
Notre Monde Notre Monde (2013, 119') un film de Thomas LacosteRassemblant plus de 35 intervenants, philosophes, sociologues, économistes, magistrats, médecins, universitaires et écrivains, Notre Monde propose un espace dexpression pour travailler, comme nous y enjoint JeanLuc Nancy à « une pensée commune ». Plus encore quun libre espace de parole, Notre Monde sappuie sur un ensemble foisonnant de propositions concrètes pour agir comme un rappel essentiel, individuel et collectif : « faites de la politique » et de préférence autrement.
Retour
© Passant n°34 [avril 2001 - mai 2001]
© Passant n°34 [avril 2001 - mai 2001]
par Hervé Le Corre
Imprimer l'articleNotes intempestives
Génération Mitterrand : Deux symboles du pire dont est capable une certaine gauche accrochés ces temps-ci par la justice : Gilbert Mitterrand et Roland Dumas. Trafics darmes, détournements dargent public par dizaines de millions de francs. Gros gibier pour affaires maousses. Bien sûr, les faux-culs du PS, dhabitude si prompts à convoquer, pour occuper un peu lestrade, des journalistes encore plus prompts à rappliquer, en bons chiens couchants, se sont faits horriblement discrets : ils eussent pu défendre les institutions de la République après les menaces faites aux juges par lancien Baiseur du Quai dOrsay, dignes dun mafieux sénile, et lattitude minable de la mère de son fiston, parlant de « rançon » pour évoquer la caution1 versée pour la libération du Gilbert.
Quun homme dÉtat se comporte comme un voyou érotomane, les roustons cajolés dans la soie par une « putain » (sic) hors de prix, cest écurant, mais guère surprenant, on voit ça dans les films noirs. Bien sûr, je vous laccorde, on nest pas à Chicago dans les années 20, mais bien en France, au début du IIIe millénaire. Je propose quon soit donc impitoyable.
Mais quune femme, jusque là infiniment plus respectable que son époux grâce notamment à son engagement en faveur du Tiers-monde ou des droits de lhomme, monte sans hésiter au créneau pour défendre son fils compromis dans un trafic darmes en Afrique, continent le plus martyrisé, le plus dévasté de la planète par léventail complet des souffrances infligées aux hommes, voilà qui ne manque pas de choquer, voire de provoquer la nausée. Que la dame se soit ensuite montrée au contre-sommet de Porto Alegre2 témoigne dun cynisme particulièrement sophistiqué, et aurait mérité quon la foute dehors, ou, pour faire bonne mesure, quon applique sur le champ la taxe Tobin au pognon versé à la justice. Évidemment, cette passionaria de salon na pas commenté larnaque mauritanienne3 où « Papamadi » prétend avoir réinvesti les fruits de ses magouilles.
Danièle Mitterrand, cest un peu Lady Di chez les Picaros. Le Tiers-monde comme alibi exotique, larrogance des riches comme grisaille quotidienne.
Papon : Désolé, mais il faut avoir ce mois-ci lestomac bien accroché. On nous fait le coup du pauvre vieux taulard, malade, qui aimerait bien calencher dans son lit entouré des siens. Putain, là, on va pleurer. Surtout si Robert Badinter nous sort le grand jeu, reprenant les intonations de ses grandes plaidoiries contre la peine de mort. On sétonne, on sindigne. Quoi ? Badinter ? Cet homme dhonneur ? Ce grand mec à linaltérable rigueur morale ? Ben oui ! Parce quen réfléchissant un peu, on se rappelle quil a tout fait, avec François Mitterrand, pour empêcher que ne soient jugés les français coupables de crimes contre lHumanité. Voilà donc une mansuétude qui ne date pas dhier.
En revanche, que le MRAP enfourche le même bidet révulse bien davantage, avec son couplet sur les vieux détenus4. Il ne serait pas étonnant quun projet de loi fût bientôt déposé pour accorder je ne sais quelle grâce à caractère humanitaire à lensemble des vieillards en prison, au-delà dun certain âge Une sorte damendement Papon Et je vois dici maître Varaud venir se féliciter devant les caméras que le cas de son client ait apporté une contribution au respect des droits de lhomme Une façon de boucle serait ainsi scellée, le rachat en solde dun scélérat qui a su organiser son insolvabilité pour navoir même pas à indemniser ses victimes.
On rappellera utilement, même si les principaux représentants des parties civiles lont déjà fait, que les déportés de Bordeaux (comme des millions dautres) nont pas eu la chance de pouvoir vieillir, quand ils étaient jeunes, et que nul ne sest soucié de lâge ni de létat de santé des vieillards embarqués dans les wagons. Réalités que ni Papon, ni ses défenseurs, anciens ou nouveaux, ne semblent percevoir. Ni regrets exprimés, ni pardon demandé, à aucun moment, par le complice des nazis. Ne jamais oublier cette violence-là, dont il a fait preuve du début des investigations jusquà la fin de son procès.
Boat people kurdes : Après léchouage, le 17 février dernier, de 900 émigrés kurdes à bord de lEast Sea, près de Saint-Raphaël, les socialistes ont une fois de plus fait preuve de la bêtise réactionnaire dont ils sont désormais les porteurs, aux côtés dune droite qui nen demande pas tant (« Et nous, quest-ce qui nous reste pour être pires ? Et nos électeurs ? », dit-on au RPR et ailleurs). François Hollande et Daniel Vaillant, soutenus par Chevènement5, ont carrément réclamé lexpulsion pure et simple des exilés. La thèse formulée il y a quelques années par le très libéral Rocard sur limpossibilité daccueillir « toute la misère du monde » fait florès et constitue la ligne politique du PS en matière dimmigration. Les sauf-conduits arrachés au gouvernement par les organisations de soutien neffaceront pas la violence ni le cynisme des premières réactions, quon peut qualifier dinstinctives...
À ce propos, la « gauche » ne se décide toujours pas à régulariser les dizaines de milliers de sans-papiers « sortis du bois », comme la écrit J.-B. Pouy dans Libé. Décidément, la gauche... On va pas remettre le couvert sur lénorme déception que constitue, depuis trois ans, cette pleutre pluralité.
Élections municipales : La « gauche », donc, a pris une sorte de branlée, bien fait. Branlée plurielle, of course. Le PC, en voie datomisation, devra choisir son camp, sil le veut. À Paris, Delanoé, supporteur du dictateur tunisien Ben Ali, devient maire. Cest sans doute mieux que la corruption du gang Tibéri ou que la colossale finesse tactique de Séguin. Bon... Lyon a pour maire un gus qui se présente lui-même comme « barriste de gauche »... vertigineux, nest-il pas ? Toulouse nous déçoit beaucoup : Ouste, Douste ! Ce sera pour la prochaine. Lextrême-gauche y a frôlé les 20% de suffrages ; le score des Motivé-e-s et de la LCR là-bas est bien la seule nouvelle un peu rafraîchissante de ces élections où a surtout triomphé labstention, après une campagne tristouille, à linstar de ce quon a vu à Bordeaux.
Ici, donc (où la droite ne risquait rien, puisque la gauche ne risquait pas grand chose), la liste Savary (PS, PC) nous proposait de voter pour une « bourge de gauche » en la personne de Michèle Delaunay6, en deuxième position. Comme elle vient dêtre élue, ça va être ça, lopposition à Juppé : après cinq minutes de baratin bcbg, Lou Tignous7 et ses sbires lui couperont le micro, fidèles en cela à leurs habitudes de grands démocrates.
Cartes brouillées, gauche perdue, droite stupide. Impasses et manques.
On était un bon paquet dans la rue en janvier contre les projets du MEDEF sur les retraites. Et les grèves éclatent çà et là, dures, parfois inattendues. La colère monte, on dirait. Et Jospin ne semble pas vouloir comprendre lavertissement des urnes et du mouvement social. Ce sera tant pis pour lui et les siens, bientôt. Restons groupés.
Ah, les faire trembler encore quelquefois avant de crever !
Dernière minute : Élection dAlain Juppé à la présidence de la CUB, où le suffrage universel avait placé une majorité de gauche. Deux conseillers PS ont voté à droite. On voyait venir le coup depuis quelques jours, mais on se disait quils noseraient pas. Et puis si. Déni de démocratie, trahison pure et simple. Magouille. Du vent dans les voiles, propose Jospin, ignorant lavertissement des urnes, après les municipales. Avec des coups de lattes au derche, ça nirait pas plus vite ? Mot dordre : on achète tous de grosses chaussures à bouts ferrés.
Quun homme dÉtat se comporte comme un voyou érotomane, les roustons cajolés dans la soie par une « putain » (sic) hors de prix, cest écurant, mais guère surprenant, on voit ça dans les films noirs. Bien sûr, je vous laccorde, on nest pas à Chicago dans les années 20, mais bien en France, au début du IIIe millénaire. Je propose quon soit donc impitoyable.
Mais quune femme, jusque là infiniment plus respectable que son époux grâce notamment à son engagement en faveur du Tiers-monde ou des droits de lhomme, monte sans hésiter au créneau pour défendre son fils compromis dans un trafic darmes en Afrique, continent le plus martyrisé, le plus dévasté de la planète par léventail complet des souffrances infligées aux hommes, voilà qui ne manque pas de choquer, voire de provoquer la nausée. Que la dame se soit ensuite montrée au contre-sommet de Porto Alegre2 témoigne dun cynisme particulièrement sophistiqué, et aurait mérité quon la foute dehors, ou, pour faire bonne mesure, quon applique sur le champ la taxe Tobin au pognon versé à la justice. Évidemment, cette passionaria de salon na pas commenté larnaque mauritanienne3 où « Papamadi » prétend avoir réinvesti les fruits de ses magouilles.
Danièle Mitterrand, cest un peu Lady Di chez les Picaros. Le Tiers-monde comme alibi exotique, larrogance des riches comme grisaille quotidienne.
Papon : Désolé, mais il faut avoir ce mois-ci lestomac bien accroché. On nous fait le coup du pauvre vieux taulard, malade, qui aimerait bien calencher dans son lit entouré des siens. Putain, là, on va pleurer. Surtout si Robert Badinter nous sort le grand jeu, reprenant les intonations de ses grandes plaidoiries contre la peine de mort. On sétonne, on sindigne. Quoi ? Badinter ? Cet homme dhonneur ? Ce grand mec à linaltérable rigueur morale ? Ben oui ! Parce quen réfléchissant un peu, on se rappelle quil a tout fait, avec François Mitterrand, pour empêcher que ne soient jugés les français coupables de crimes contre lHumanité. Voilà donc une mansuétude qui ne date pas dhier.
En revanche, que le MRAP enfourche le même bidet révulse bien davantage, avec son couplet sur les vieux détenus4. Il ne serait pas étonnant quun projet de loi fût bientôt déposé pour accorder je ne sais quelle grâce à caractère humanitaire à lensemble des vieillards en prison, au-delà dun certain âge Une sorte damendement Papon Et je vois dici maître Varaud venir se féliciter devant les caméras que le cas de son client ait apporté une contribution au respect des droits de lhomme Une façon de boucle serait ainsi scellée, le rachat en solde dun scélérat qui a su organiser son insolvabilité pour navoir même pas à indemniser ses victimes.
On rappellera utilement, même si les principaux représentants des parties civiles lont déjà fait, que les déportés de Bordeaux (comme des millions dautres) nont pas eu la chance de pouvoir vieillir, quand ils étaient jeunes, et que nul ne sest soucié de lâge ni de létat de santé des vieillards embarqués dans les wagons. Réalités que ni Papon, ni ses défenseurs, anciens ou nouveaux, ne semblent percevoir. Ni regrets exprimés, ni pardon demandé, à aucun moment, par le complice des nazis. Ne jamais oublier cette violence-là, dont il a fait preuve du début des investigations jusquà la fin de son procès.
Boat people kurdes : Après léchouage, le 17 février dernier, de 900 émigrés kurdes à bord de lEast Sea, près de Saint-Raphaël, les socialistes ont une fois de plus fait preuve de la bêtise réactionnaire dont ils sont désormais les porteurs, aux côtés dune droite qui nen demande pas tant (« Et nous, quest-ce qui nous reste pour être pires ? Et nos électeurs ? », dit-on au RPR et ailleurs). François Hollande et Daniel Vaillant, soutenus par Chevènement5, ont carrément réclamé lexpulsion pure et simple des exilés. La thèse formulée il y a quelques années par le très libéral Rocard sur limpossibilité daccueillir « toute la misère du monde » fait florès et constitue la ligne politique du PS en matière dimmigration. Les sauf-conduits arrachés au gouvernement par les organisations de soutien neffaceront pas la violence ni le cynisme des premières réactions, quon peut qualifier dinstinctives...
À ce propos, la « gauche » ne se décide toujours pas à régulariser les dizaines de milliers de sans-papiers « sortis du bois », comme la écrit J.-B. Pouy dans Libé. Décidément, la gauche... On va pas remettre le couvert sur lénorme déception que constitue, depuis trois ans, cette pleutre pluralité.
Élections municipales : La « gauche », donc, a pris une sorte de branlée, bien fait. Branlée plurielle, of course. Le PC, en voie datomisation, devra choisir son camp, sil le veut. À Paris, Delanoé, supporteur du dictateur tunisien Ben Ali, devient maire. Cest sans doute mieux que la corruption du gang Tibéri ou que la colossale finesse tactique de Séguin. Bon... Lyon a pour maire un gus qui se présente lui-même comme « barriste de gauche »... vertigineux, nest-il pas ? Toulouse nous déçoit beaucoup : Ouste, Douste ! Ce sera pour la prochaine. Lextrême-gauche y a frôlé les 20% de suffrages ; le score des Motivé-e-s et de la LCR là-bas est bien la seule nouvelle un peu rafraîchissante de ces élections où a surtout triomphé labstention, après une campagne tristouille, à linstar de ce quon a vu à Bordeaux.
Ici, donc (où la droite ne risquait rien, puisque la gauche ne risquait pas grand chose), la liste Savary (PS, PC) nous proposait de voter pour une « bourge de gauche » en la personne de Michèle Delaunay6, en deuxième position. Comme elle vient dêtre élue, ça va être ça, lopposition à Juppé : après cinq minutes de baratin bcbg, Lou Tignous7 et ses sbires lui couperont le micro, fidèles en cela à leurs habitudes de grands démocrates.
Cartes brouillées, gauche perdue, droite stupide. Impasses et manques.
On était un bon paquet dans la rue en janvier contre les projets du MEDEF sur les retraites. Et les grèves éclatent çà et là, dures, parfois inattendues. La colère monte, on dirait. Et Jospin ne semble pas vouloir comprendre lavertissement des urnes et du mouvement social. Ce sera tant pis pour lui et les siens, bientôt. Restons groupés.
Ah, les faire trembler encore quelquefois avant de crever !
Dernière minute : Élection dAlain Juppé à la présidence de la CUB, où le suffrage universel avait placé une majorité de gauche. Deux conseillers PS ont voté à droite. On voyait venir le coup depuis quelques jours, mais on se disait quils noseraient pas. Et puis si. Déni de démocratie, trahison pure et simple. Magouille. Du vent dans les voiles, propose Jospin, ignorant lavertissement des urnes, après les municipales. Avec des coups de lattes au derche, ça nirait pas plus vite ? Mot dordre : on achète tous de grosses chaussures à bouts ferrés.
(1) Somme considérable 5 millions de francs - réunie en quelques jours grâce à la « générosité » damis avocats, acteurs, chanteurs
, dixit la mater dolorosa. Un beau geste de la gauche paillette.
(2) Elle est allée aussi pleurnicher parmi les Kurdes échoués. Danièle Mitterrand, faut plus linviter.
(3) Une usine de conditionnement du poisson, qui nexiste pas, censée aider au développement de la Mauritanie. Même la télé en a parlé, cest dire que la ficelle était grosse
(4) On doit sécharper sévère au MRAP, dont évidemment tous les membres ne partagent pas lopinion de Mouloud Aounit, Comme Jean Ferrat, qui se dit prêt à quitter le mouvement si la position nest pas rectifiée dare-dare (lHuma du 9/02).
(5) Sur France Inter, le 25/02.
(6) Cest elle qui le dit, dans un de ces fracassants reportages dont Sud Ouest a le secret. Fille de lancien préfet de Gironde Gabriel Delaunay, elle surfe un peu beaucoup sur lhonneur de son paternel comme si elle avait hérité de lui toutes les vertus. Politiquement indigente, elle dit avoir voté Chaban aux présidentielles de 74, enfin elle ne sait plus trop, la pauvre. Bourdieu va devoir revoir ses thèses sur les héritiers : il y a comme de la déperdition de patrimoine intellectuel...
(7) Comment Juppé dit-il, déjà, avec son élégance proverbiale, à propos des femmes en politique ? « Il faut virer les pétasses », cest ça ? Pendant les conseils municipaux, ça va être « classe contre classe »
(2) Elle est allée aussi pleurnicher parmi les Kurdes échoués. Danièle Mitterrand, faut plus linviter.
(3) Une usine de conditionnement du poisson, qui nexiste pas, censée aider au développement de la Mauritanie. Même la télé en a parlé, cest dire que la ficelle était grosse
(4) On doit sécharper sévère au MRAP, dont évidemment tous les membres ne partagent pas lopinion de Mouloud Aounit, Comme Jean Ferrat, qui se dit prêt à quitter le mouvement si la position nest pas rectifiée dare-dare (lHuma du 9/02).
(5) Sur France Inter, le 25/02.
(6) Cest elle qui le dit, dans un de ces fracassants reportages dont Sud Ouest a le secret. Fille de lancien préfet de Gironde Gabriel Delaunay, elle surfe un peu beaucoup sur lhonneur de son paternel comme si elle avait hérité de lui toutes les vertus. Politiquement indigente, elle dit avoir voté Chaban aux présidentielles de 74, enfin elle ne sait plus trop, la pauvre. Bourdieu va devoir revoir ses thèses sur les héritiers : il y a comme de la déperdition de patrimoine intellectuel...
(7) Comment Juppé dit-il, déjà, avec son élégance proverbiale, à propos des femmes en politique ? « Il faut virer les pétasses », cest ça ? Pendant les conseils municipaux, ça va être « classe contre classe »