Sortie du DVD de Notre Monde
Notre Monde Notre Monde (2013, 119') un film de Thomas LacosteRassemblant plus de 35 intervenants, philosophes, sociologues, économistes, magistrats, médecins, universitaires et écrivains, Notre Monde propose un espace dexpression pour travailler, comme nous y enjoint JeanLuc Nancy à « une pensée commune ». Plus encore quun libre espace de parole, Notre Monde sappuie sur un ensemble foisonnant de propositions concrètes pour agir comme un rappel essentiel, individuel et collectif : « faites de la politique » et de préférence autrement.
Lionel Bourg
LEscampette, 2003, 36 p.
« Il faisait sombre dans la salle. Le rideau souvrit. Le type debout chantait. Javais seize ans, quinze ou dix-sept. Je nen suis jamais revenu. » La scène se passe à Saint-Étienne, au milieu des années 60. Lionel Bourg, lycéen, tuait un incommensurable ennui « en gueulant comme un putois » les vers de Cendrars, de Villon et dApollinaire. « Rien ne marrachait à moi. Au deuil. A la mélancolie. Au mutisme. » Quand, dans la salle des Mutilés du Travail, débarque ce type aux yeux de chien battu, éructant ces mots qui habillent la révolte, font décoller la souffrance et offrent des frères en désespoir. Ce type qui hurle « écoute-moi Lazare » et fait se dresser les moribonds. Lève toi et marche, crie, hurle, bats-toi, aime ! « La vie est là avec ses poumons de flanelle » dit Léo.
« Cest ta faute, Léo, cest ta faute. Et comment prétendre nen avoir été bouleversé, il y avait ta voix, cétait trop tard, elle avait sorti les couteaux. » Un beau chemin de traverse sest alors offert aux pas de Bourg, le marcheur, larpenteur de colline et de mots. Léo lui a ouvert la boîte de pandore de cette « sombre innocence » : lécriture qui ne la plus lâché, maîtresse exigeante et généreuse. Cest « ta faute si lon nest pas sérieux quand on a cinquante ans et pas mal de poussières, ta faute si tout ridés, fatigués, nous tenant par la main pour ne pas culbuter, nous sommes dans les ascenseurs ces pâles camarades, sans fric, sans papier, sans bande à cul ni notaire, qui tirent une carte alors quils savent quils sont toujours perdants, ta faute, si nous rêvons enfin et si, dans la dimension X, les portes de secours que tu laissas battantes souvrent à jamais maintenant sur des nuées détoiles ». Adieu Léo.
Merci Lionel.