Sortie du DVD de Notre Monde
Notre Monde Notre Monde (2013, 119') un film de Thomas LacosteRassemblant plus de 35 intervenants, philosophes, sociologues, économistes, magistrats, médecins, universitaires et écrivains, Notre Monde propose un espace dexpression pour travailler, comme nous y enjoint JeanLuc Nancy à « une pensée commune ». Plus encore quun libre espace de parole, Notre Monde sappuie sur un ensemble foisonnant de propositions concrètes pour agir comme un rappel essentiel, individuel et collectif : « faites de la politique » et de préférence autrement.
Luis Sepulveda
Paris, éd. Métailié, 2003, 112 p.
Pour ceux qui lont oublié, le 11 septembre était déjà rentré dans lhistoire. Cétait en 73, jour du coup détat de la CIA (Nixon et Kissinger, futur prix Nobel de la Paix) et de sa créature Pinochet contre Salvatore Allende et la gauche chilienne qui avait pris le pouvoir démocratiquement trois ans auparavant. Ce jour-là, Salvatore Allende se suicidait dans le palais présidentiel de la Moneda. Des milliers de Chiliens périrent sous les coups des fascistes. Luis Sepulveda fut un cadre politique de lUnité Populaire, membre du parti socialiste dAllende. Arrêté, torturé, il a dû fuir sa patrie, contraint à lexil comme beaucoup de chiliens qui avaient cru à cette révolution pacifique. Quand le 17 octobre 1998, il apprit larrestation de Pinochet, à Londres, il crut enfin venue lheure de rendre justice à la mémoire des victimes de la junte militaire qui a fait peser sa chape de plomb sur le Chili jusquen 89. Il crut en avoir fini avec lamnésie érigée en raison détat. Pinochet aurait à répondre de ses crimes devant une cour internationale de justice comme Milosevic. Luis Sepulveda la espéré et sest investi corps et âme dans cette croisade de la vérité et de la mémoire, ni oubli ni pardon. La folie de Pinochet réunit des textes publiés alors dans plusieurs grands quotidiens en Europe, au Chili et en Argentine. De lespoir à la colère quand le caudillo réussit à se soustraire à laction de la justice en jouant la folie, Luis Sepulveda revient sur « lhistoire infâme de linfamie », celle du Chili écrite dans un langage de grand propriétaire par leurs contremaîtres: les forces armées chiliennes. Des pages superbes sur « ceux qui nous manquent nont pas leur statue dans les parcs mais ils sont à labri dans les mémoires », dautres encore sur le retour de Carlitos, son fils au Chili. Le livre se termine sur un court texte où Sepulveda répond à la question : pourquoi jécris ? « Jécris pour résister à limposture [...] jécris parce que jai de la mémoire et je la cultive en écrivant sur les miens , sur les habitants marginaux de mes mondes marginaux, sur mes utopies bafouées, sur mes glorieux et glorieuses camarades vaincus dans mille batailles et qui continuent à préparer les prochains combats sans craindre les défaites ».